À l’automne 1941, alors qu’il est interné dans le camp du Vernet, Rudolf Leonhardt rédige Geiseln [Les otages], première pièce allemande consacrée à la Résistance française. Il s’inspire d’un fait réel, l’exécution d’otages par des soldats de la Wehrmacht, dont il a eu connaissance par la presse et qui l’a particulièrement ému. Il s’agira d’analyser les moyens dramaturgiques par lesquels Leonhard figure ici la dictature et ses mécanismes, en particulier à travers la délégation de la violence, mais aussi les échos à sa propre expérience de la guerre et de l’internement, ainsi que les stratégies d’écriture de cette pièce d’actualité (Zeitstück), nourrie de réminiscences bibliques et littéraires. Enfin, on interrogera la réception de cette pièce : au terme de péripéties qui relèvent d’une véritable « résistance », elle put quitter le camp du Vernet et fut publiée une première fois à Lyon en juin 1945 (édition privée), puis publiée et jouée en Allemagne à partir de 1947, le sujet lui conférant une place singulière dans le théâtre d’après-guerre et dans l’histoire des relations culturelles franco-allemandes.